L’attentat à la bombe commis le 3 octobre 1980 contre la
synagogue de la rue Copernic à Paris (4 morts, des dizaines de blessés) fera l’objet d’un procès dès demain 3 avril, plus de 40 ans après les faits. Clément
Weill-Raynal, journaliste spécialiste des affaires judiciaires, retrace dans
cette enquête les errements de la justice française dans le traitement de
Hassan Diab, professeur de sociologie libano-canadien et seul accusé, qui sera jugé en son absence.
Hassan Diab est défendu par Amnesty International, qui demande
dans un communiqué du 15 mars l’abandon des poursuites, jugées « infondées
et entachées d’irrégularités ». A la lecture de l’enquête, les arguments
de l’ONG paraissent faibles et la culpabilité du sociologue très vraisemblable,
du fait notamment que l’accusation repose sur un gros faisceau d’indices très
concordants.
Clément Weill-Raynal se penche notamment sur l’ordonnance de
non-lieu rendue en 2018, permettant la libération de Hassan Diab, extradé en
2014 et incarcéré en France pendant 3 ans. Les magistrats prennent notamment « pour
argent comptant » la version d’une amie du mis en cause, alors que sa
déposition est «manifestement émaillée
de contradictions, d’invraisemblances et de mensonges ».
Se dessine au fil des pages une nouvelle version du « pacte de non-agression » qu’Yves Bonnet , ex- patron de la DST, a reconnu avoir passé avec le chef terroriste Abou Nidal : « plus d’attentats sur le sol français » contre l’engagement de « ne pas être poursuivi en France ». Mais apparaît aussi le statut accordé au FPLP, mouvement palestinien ciblé par l’enquête, qui « bénéficiait d’un certain crédit » en Europe, comme l’écrivent les juges dans l’ordonnance de non-lieu, ainsi qu’un « déni spécifique » dans le cas de cet attentat « clairement antisémite », alors qu’ « en France, la lutte des Palestiniens demeure une cause sacrée ».
Il aura fallu l’obstination du
parquet pour qu’après plus de 3 ans le non-lieu soit annulé et Hassan Diab
renvoyé devant une cour d’assises spéciale. « Jamais, dans une affaire de
terrorisme, les magistrats de la cour d’appel n’ont ainsi désavoué des juges
d’instruction », souligne l’auteur.